mardi 28 mars 2017

L'avis de Bénédicte sur La lettre et le Peigne...

...pour son blog Les lymbes des Maux


Le drame quand tu déménages, que tu organises un salon du polar, que tu travailles dans une librairie, que tu fais des bêta-lectures à droite & à gauche et que tu écris aussi des trucs à droite et à gauche, c'est qu'il peut t'arriver de "paumer" certains livres que tu devais lire. Et ce livre-là, l'auteur en personne avait tenu à me l'envoyer lors de sa sortie, après ma chronique mitigée de son précédent livre, La Position des tireurs couchés (paru chez Fleur Sauvage début 2016).
Autant dire que la pression était lourde pour moi, parce qu'on n'aime pas dire à un auteur sympathique comme Nils qu'on a pas été conquise. Parce qu'écrire un livre, quel qu'il soit, ça demande un travail énorme, et presque le sacrifice d'une partie de soi.
Hé ben je peux vous dire que je respire enfin après avoir terminé La Lettre et le peigne, parce que je sais pourquoi je n'ai pas trop aimé l'avant-dernier : c'était juste pas un thème qui me parlait. Et comme le style collait au thème de ce livre-là... bah voilà !
Ici, bien au contraire, j'ai été happée par cette " petite histoire dans la grande " !(...)

Une fois n'est pas coutume je ne vais pas vous la faire à rallonge (la chronique, hein ! ).
L'essentiel est dit ci-dessus. Une histoire de famille forte, tragique, dramatique mais si belle et... ah bah putain ! On aborde la Seconde Guerre Mondiale de l'autre côté, avec Anna, une berlinoise à moitié juive qui va vivre un drame... mais au bout de celui-ci, un enfant, Josef, puis son petit-fils, Jacob qu'on va suivre durant une bonne partie de ce livre. Et entre les deux il y a cette étrange lettre, que Anna était censée transmettre via un oncle à son fils. Sauf que la lettre s'est perdue, et c'est Jacob qui va devoir s'y coller, peut-être aussi parce que sa vie en dépend. Je n'en dis pas plus concernant le pitch, pas la peine.

Concernant le livre en lui-même, rien à voir avec La Position des tireurs couchés à part le commissaire Kuhn (personnage récurrent dans l'oeuvre de Nils Barrellon) qui fait une petite apparition.
Rien que le style est super : clair, fluide, maîtrisé, au service de l'intrigue, et quelle intrigue ! Un récit énormément documenté, et des flashbacks ainsi qu'une reconstitution historique restitués à merveille ! L'intrigue va en partie se concentrer sur une enquêtrice allemande, la capitaine Hoffer, et on en apprend beaucoup sur les procédures d'enquête allemandes, bien différentes des nôtres. Historiquement, c'est aussi une grosse claque : la seconde guerre mondiale vue du côté allemand, comme la prise de Berlin par les Alliés, la terreur qu'ont vécu les allemands à moment-là, mais c'est aussi la Guerre Froide plus tard, avec son mur et ses deux Allemagnes. J'ai vraiment adoré ces précisions historiques et ces reconstitutions très véridiques.
Bon, et puis THE sujet central du livre, ce sont les nazis. Parce que le peigne... c'est pas n'importe quel peigne. Et si Jacob a la mort aux trousses, ce n'est pas qu'à cause de ses origines juives. Des membres d'un groupuscule d'extrême droite très violent lui courent après, commandités par un obscur personnage dont j'aurais toutefois aimé en apprendre plus. Mais peut-être qu'il y aura une suite à ce sujet ?
Vous l'aurez compris, je m'auto-censure pour ne pas trop en dire car je ne m'attendais vraiment pas à ça ! J'avoue que la 4ème de couv' dévoilait beaucoup de choses, je me demandais donc comment tout cela allait bien pouvoir s'imbriquer. Eh bien l'auteur parvient à tisser un remarquable polar historique dans lequel le spectateur ne s'ennuie à aucun moment ! Et il y a de la matière à une adaptation cinématographique tant Le peine et la lettre est rythmé, profond et sa fin vous laissera sur le cul... une extrapolation avec la "Grande" histoire (tout du moins l'officielle) qui fait réfléchir et s'interroger sur ses Alliés qui nous ont peut-être caché des choses, qui sait...
Enfin, je me suis attachée à ces personnages. Anna m'a fait vibrer dans les ruines de Berlin avec ces Russes inquiétants, et puis même avant, dans l'enfer du Lager... J'ai eu peur pour Jacob, ce musicien qui se prend un beau jour le ciel sur la tête et qui doit fuir, se cacher pour rester en vie et tenter de découvrir l'incroyable vérité. J'ai aimé la froide et touchante Hoffer, de même que les personnages secondaires qui ne sont pas en reste. Et puis le tandem des deux connards qui pourchassent Jacob, drôle (genre Laurel & Hardy) mais ô combien fous à lier !

MA NOTE : 5 / 5
-> UN POLAR SURPRENANT QUI MÉLANGE UNE HISTOIRE FAMILIALE DRAMATIQUE DANS LA GRANDE HISTOIRE ! FORT, VIBRANT, EXTRÊMEMENT BIEN RECONSTITUÉ, ÉNERGIQUE, RYTHMÉ, ÉMOUVANT, CHOQUANT, TOUT EST RÉUNI POUR VOUS FAIRE PASSER UN MOMENT INOUBLIABLE !

Vous l'aurez compris, j'ai énormément apprécié La Lettre et le peigne. Sa construction en courts chapitres qui alternent les différents protagonistes & les nombreux flashbacks font que le lecteur est ferré d'emblée.
Les nombreuses références historiques & judiciaires sont très bien imbriquées dans l'intrigue, ce qui fait qu'on y est et qu'on ne s'ennuie pas (ce qui peut parfois être le risque lorsqu'on verse trop dans la reconstitution). On a plaisir à suivre certains personnages et à tenter de deviner là où veut nous emmener l'auteur.
Il y a eu des rebondissements qui m'ont laissée sur le fondement... on ne les voit pas du tout arriver. Même trash pour certains, à tel point que j'ai eu envie d'envoyer le livre faire un petit vol plané (mais je l'ai pas fait, hein !).
Ah ! Je pourrais vous en dire tellement plus... que c'est frustrant ! Nils Barrellon a brillamment réussi à m'endormir pour qu'on ne devine pas le pourquoi du comment ! Ah là là ! C'est retors et tordu, mais plus que bienvenu ! C'est en plus cohérent et plausible, et à la fin, ça nous fait réfléchir. Tout ce qu'on ne nous dit pas, tout ce dont on a eu vent après la fin de la guerre... bref, un livre comme je les aime !
Bravo Nils, c'est un carton plein pour moi !

jeudi 23 mars 2017

Un avis succint mais ô combien sympa de La lettre et le Peigne...

...pour le site Le Rayon du Polar


Pour voler un peigne, ils n’ont pas hésité à tuer un gardien ! Mais il est vrai que ce peigne caressa les cheveux du Führer à moins que ce ne soit sa moustache…
Une nuit, alors qu’il rentre chez lui, Jacob Schmidt est sauvagement agressé par des inconnus…
Très vite le lecteur apprend que les agresseurs de Jacob sont les auteurs du vol du peigne. Si les raisons qui pousse la mystérieuse organisation, d’évidence nostalgique du 3ème Reich, à kidnapper Jacob Schmidt demeurent obscures jusqu’au dénouement, le lecteur en entrevoit malgré tout les contours, à tel point que les révélations finales qu’il découvre en lisant la lettre que la grand-mère de Jacob, Anna Schmidt, destinait à son fils, ne le surprennent pas vraiment.
a force de ce roman ne réside donc pas dans l’intrigue qui s’y déploie, mais dans son agencement. Tout le talent de conteur de Nils Barrellon se loge dans sa capacité à embarquer ses lecteurs dans un voyage protéiforme. Le périple, qui conduit Jacob de Berlin à Rennes, de Francfort à Paris, se double de sauts désordonnés d’une décennie à l’autre avec l’élégance des grandes plumes, de celles qui rendent addicte, de celles qui éclairent la nuit des insomniaques

jeudi 16 mars 2017

L'avis sur La lettre et le Peigne...

...de la librairie Soleil Vert


Nils Barrellon est professeur de science-physique à Paris. La lettre et le peigne est son quatrième roman (le 3e qui met en scène le commissaire Kühn, bien qu'ici ce dernier ne fasse que de la figuration). D'abord publié aux éditions City, le voilà intégrant le catalogue Jigal, initialement cantonné au polar marseillais, puis élargi au polar méditerranéen en général et qui désormais s'ouvre à d'autres géographies.
L'auteur nous raconte sur près de 70 ans, le destin de la famille Schmidt, de la grand-mère Anna qui apparait dès le premier chapitre en 1945 dans un Berlin en ruine, de son fils Joseph puis enfin, de nos jours, de Jacob, son petit-fils. L'histoire démarre lorsque ce dernier se fait agresser après une soirée, entraînant le lecteur dans une aventure qui le mène de Francfort à Berlin, de Paris à Rennes en passant par Wiesbaden et Berne à la poursuite d'une mystérieuse lettre écrite par Anna.
Barrellon livre ici un thriller historique "franco-allemand" très fluide, hyper rythmé et cinématographique - clairement inspiré des séries télévisées dont l'auteur est friand - un roman-puzzle, voire choral où l'action est toujours au premier plan. Lui qui n'a jamais mis les pieds en Allemagne (authentique) n'a pas pour autant négligé un gros travail de documentation afin de donner à la fois une épaisseur historique, une crédibilité géographique et une touche linguistique, n'hésitant pas à saupoudrer son texte de mots et d'expressions germaniques. Et son découpage non linéaire de la chronologie ajoute au suspense, c'est parfaitement maitrisé.
S'il est un défaut à signaler, il est inhérent à la qualité de l'auteur de dresser des personnages charismatiques. De fait, on regrettera que certains ne prennent pas plus de place dans l'histoire. La capitaine de police Hoffer, par exemple, mériterait bien une série de polars rien qu'à elle.
Un nouvel auteur, donc, sur les bancs de la littérature policière française, qui mérite qu'on le suive avec intérêt. Si le contexte franco-allemand est ce qui a motivé la lecture de ce titre en particulier, il est pas impossible que je me reporte sur ses premiers romans qui ont eux aussi rencontré une critique très favorable.