... pour le blog Quatre sans Quatre
Le pitch
Berlin, avril 1945 : la ville est en ruine, les derniers débris du Reich s'effondrent dans les hurlements des orgues de Staline.
Les Russes sont là, la rumeur enfle, court, terrifie les femmes et les
enfants, des hommes, il n'y en a plus, ou si peu, des résidus d'hommes
même plus assez bons pour se faire massacrer. Anna Schmidt n'a plus
rien, elle déambule dans les ruines pour trouver de quoi se terrer,
vivre encore un peu.
Berlin-Est, 1953 : Anna remet une lettre à son cousin Heinrich. Il ne doit pas l'ouvrir, ne sait pas ce qu'elle contient, il devra juste la remettre à Josef, le fils d'Anna s'il lui demande.
Septembre 2012 : un gardien de nuit est tué dans un musée d'Histoire de Berlin,
le butin est dérisoire, un peigne avec une croix gammée. La capitaine
Anke Hoffer du BKA, chargée des enquêtes sur les crimes potentiellement
politiques, ne va pas poursuivre très longtemps ses investigations,
d'autres affaires l'attendent à Wiesbaden.
Quelques mois plus tard, le hasard met Hoffer en contact avec Jacob Schmidt
venu au commissariat porté plainte après une agression. Il sortait d'un
club où il avait joué avec son groupe. Anke est troublée par son
témoignage.
Jacob Schmidt ne se sent plus en sécurité, il se sait suivi.
Il se souvient alors de la lettre dont son père lui a parlé et part
dans une impossible quête, de Francfort à Paris en passant par Berlin...
L'avis de Quatre Sans Quatre
La Lettre et le Peigne débute dans un paysage de désolation absolue,
en avril 1945, les rues de Berlin en ruine, résidu d'un empire prévu
pour mille ans, effondré en à peine douze. Des êtres hagards errent pour
tenter de survivre encore un peu. Ils savent à peine pourquoi tant la
sidération est grande. Les Russes sont là, ils sont partout. On leur a
tant dit qu'ils étaient des sauvages sanguinaires que les rares rescapés
du désastre sont tétanisés. Anna, une jeune femme sortie de nulle part,
titube entre les chicots de murs dans le fracas des obus et les rafales
soviétiques. Quand ce sont les SS qui vous expliquent que les ennemis
sont des brutes, on comprend la terreur ! Mais la vie d'Anna ne
s'achèvera pas ici. La vie, comme toujours, se glisse entre les
gravats...
Ensuite, Nils Barrellon va swinguer entre les histoires d'Anna et de sa descendance,
il passe de la République Démocratique d'Allemagne, les débuts de la
Stasi et l'Allemagne d'aujourd'hui où des spectres répugnants s'agitent
encore. Jacob est un bon gars, simple, musicien sans grande ambition,
amant sans trop de conviction d'une jeune institutrice, orphelin sans
histoire, heureux avec ses potes. Jusqu'à cette tentative d'enlèvement
devant chez lui. Celle-ci va l'entraîner dans une course-poursuite
démente au cours de laquelle il va découvrir bien des secrets sur ses
origines, et pas des plus simples à assumer...
En dehors des passages historiques passionnants, Jacob tient le roman, il est la pièce centrale et l'auteur lui fait vivre un enfer.
De sombres individus, un peu stupides mais pugnaces, le traquent à
travers la France et L'Allemagne. Anke Hoffer lui vient en aide presque
par hasard, mais il est avant tout seul. C'est son chemin, il doit
l'affronter ou périr. Mère française, père est-allemand, il est le fruit
direct de la guerre froide, de la fin de la seconde guerre mondiale
même. Mauvaise nouvelle pour l'humanité, la même saloperie raciste,
antisémite, xénophobe persiste à corroder la société. Elle redresse de
plus en plus la tête, partout, même en Allemagne qu'on avait longtemps
cru vaccinée contre cette lèpre.
Outre son écriture vitaminée, ce thriller percute également parce que personne ne sait vraiment après quoi il court.
Le lecteur le découvre en même temps que les protagonistes, sursaute
aux déconvenues de Jacob, aux rebondissements qui fourmillent. Avant de
terminer sur un final totalement incroyable, inouï. Le culte du secret
aussi bien chez les poursuivants que chez les ascendants de Jacob donne
une course à l'aveugle, guidée seulement de quelques jalons plantés par
sa grand-mère, Anna. S'il faut en tirer une morale, peut-être est-ce
celle que le fascisme et l'horreur n'est pas forcément morte en avril
1945 dans un bunker de Berlin, la relève est là, aux aguets...
La Lettre et le Peigne, ce sont deux récits parallèles,
Jacob, la proie, suit sa route, cherche cette damnée lettre sur
laquelle il a si peu de renseignements, ses prédateurs chassent Jacob
sans savoir après quoi il court. Chaque page est une découverte, un
rebondissement, un piège, le final termine le boulot et vous laisse
pantois !
Pour tout savoir sur le propriétaire du peigne volé au musée, sur le
contenu de la lettre mystérieuse, qui vaut vraiment le détour, suivez les tribulations de Jacob et des brutes qui le poursuivent, vous gagnerez au passage un petit voyage dans l'ex RDA, pas vraiment un pays pimpant...
La musique du livre
Jacob est bassiste dans un groupe qui reprend des standards du jazz, ils interprètent, entr'autres titres, But Not For Me de Chet Baker.
La capitaine Anke Hoffer narre l'historique du mouvement skinheads à
Jacob et évoque la partie musicale raciste de cette sinistre saga, le
groupe Screwdriver qui a fait preuve d'un prosélytisme, en se bouchant
le nez et aussi un peu les oreilles, parce que c'est assez mauvais,
juste en référence, White Power.
Jacob, bien avant le début de ses déboires, offre à son père l'album Flashpoint des Rolling Stones, Josef écoute Ruby Tuesday pour commencer.
Ce même Jacob qui se souvient des Noël de son enfance, en Allemagne de l'est, où son père mettait Weihnachten in Familie interprété par Aurora Lacasa & Frank Schöbel sur le poste à cassettes.
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